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Rolex Paris Masters
Rolex Paris Masters 2022

Gilles Simon : "Je voulais juste en profiter une dernière fois"

La dernière interview de Gilles Simon en tant que joueur professionnel est ici... Où il parle de ses dernières émotions en tant que joueur, de la cérémonie, de sa relation avec le public.
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Gilles, cette fois c'est bien la dernière... Ce dernier tournoi, cette dernière semaine en tant que joueur professionnel était pleine d'émotions... Qu'est-ce qui vous est passé par la tête après la balle de match ?

Pas grand-chose en fait, parce que j'étais vraiment vidé. C'est vraiment le moment où je suis au bout. Forcément, j'ai envie de finir sur un beau point. Je fais un bon service, une bonne attaque, la volée j'ai tellement envie de la mettre... Mais malgré toute l'envie du monde, y a tout mon corps qui s'effondre, qui s'écroule, et je finis par une volée au milieu du filet. J'ai beau avoir envie, il ne me reste vraiment plus rien (sourire).

Donc voilà, j'étais vraiment au bout de mon effort, mais j'étais heureux d'être revenu sur le terrain un 3e fois cette semaine. Je suis content d'avoir pu disputer un match complet, parce qu'il y a eu un moment où ça s'annonçait compliqué. La défaite, ce n'est pas grave, j'ai joué un joueur qui était bien plus fort que moi.
 

Que ressentez-vous après ce dernier match ?

Je voulais finir sur une bonne note, je suis donc soulagé, plutôt content. J'ai fait des longs matchs dans ma carrière, je craignais de prendre 6/1, 6/1 au 1er tour, de perdre une 17e fois contre Andy. C'est plutôt cool de finir comme ça. Mais si je m'étais fait tordre plus tôt, ça n'aurait pas été si grave. Evidemment, je préfère quand ça se passe comme ça.

Le premier match a été très difficile d'un point de vue émotionnel, en particulier sur le court. J'étais heureux de trouver des solutions. Le deuxième match était mieux, parce que c'est toujours comme cela quand on est un peu fatigué, on pense moins. Je pense que le mix était meilleur avec Taylor, c'était vraiment un bon match. Mais ensuite, le troisième c'était le match de trop, sans jour de repos, j'étais totalement vide aujourd'hui.
 

La cérémonie était très émouvante. Beaucoup ont versé des larmes. Vous aviez anticipé cet instant ?

Non pas du tout, je ne suis pas quelqu'un qui se projette déjà. Je ne prépare jamais rien, ça sort comme ça sort. J'ai compris qu'il y avait quelque chose de préparer en début de semaine, mais je n'avais rien demandé. Lundi j'étais tombé sur Jo et Gaël, c'était une belle surprise. J'ai juste dit ce qui me paraissait important pour moi. J'ai essayé de mettre de l'ordre là-dedans, ce qui n'était pas simple. Il y a beaucoup de personnes que j'avais envie de remercier. Si ça a plu aux gens, tant mieux...

 


Vous avez remercié le public et en même temps regretté de ne pas avoir profité de cette ferveur plus tôt dans votre carrière...

Le rapport avec le public est forcément différent avec ce qu'il a pu être. Forcément, on évolue personnellement, et la perception des gens aussi. Je suis quelqu'un de très logique, de très rationnel. Quand certaines choses ne rentraient pas dans ma logique, au début j'avais du mal à le comprendre. Par exemple, quand tous les quatre (Jo Tsonga, Gaël Monfils, Richard Gasquet et lui) on jouait bien, on était dans le "top 10", j'avais du mal à entendre qu'on était des "losers". Et puis là c'est ma dernière année, j'ai l'impression d'être un "loser" quand je fais des premiers tours tout le temps et finalement, quand tu gagnes un match, on te dit "Ptain fabuleux Gilou, on t'aime !"

Evidemment c'est dur à comprendre, quand j'allais au 3e tour avant on me trouvait nul (sourire) ! Tu mets du temps à comprendre ça. C'est ça qui est dur au tennis. Il faut avoir une très grande maturité très tôt, une grande perception dès 18-19-20 ans. A ce moment-là, on veut juste être fort, juste progresser, on veut juste retourner s'entraîner, regagner des places au classement. Là, je suis de l'autre côté du spectre. Je veux juste en profiter, avec le public aussi. Le reste, je m'en fous.

J'étais quelqu'un de très renfermé sur ce que j'avais à faire. J'imagine qu'il y avait un meilleur équilibre à trouver plus tôt avec le public...


 

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Votre carrière s'achève aujourd'hui. Sans regret ?

Je suis serein parce que j'étais sûr de ma décision. Comme je l'ai expliqué, j'en étais sûr. Cette semaine, chaque match m'a rappelé pourquoi j'en étais sûr, le stress d'avant les matchs, les douleurs d'après-match, et ensuite quand cela s'enchaîne.

Cela devenait dur et je ne regrette pas. Cette semaine a été très difficile et en deux matchs, je sors complètement vidé. Cela me rappelle pourquoi je m'arrête. Il y a une partie de moi qui est soulagée que ces trucs-là s'arrêtent. Encore une fois, il y a énormément de choses que j'ai adorées, c'est pour cela que j'ai toujours voulu être joueur de tennis, cela a toujours été ma passion, c’est pour cela que je dis que j'ai été chanceux de jouer longtemps, j'insiste là-dessus, mais ce n'est pas comme si tout était du bonheur de 8 heures du matin au coucher...


Qu'est-ce qui va vous manquer ? Qu'est-ce qui ne va pas vous manquer ?

Le tennis, le jeu, va me manquer. J'ai toujours adoré jouer au tennis, je joue au tennis tout le temps ; j'adore cela. Ce qui fait que j'arrête, c'est que je ne suis plus capable de le faire et que cela fait trop mal. Dans ma tête, je suis joueur de tennis et peu importe ce que je vais faire après.

Maintenant ce qui va être mieux, c'est que je vais essayer de profiter de ma famille un maximum, rester chez moi. J'ai le temps aussi de transmettre. Je pense que ça va se décider dans l'année ou les deux ans qui viennent. Pour l'instant, je laisse...

J'ai joué très longtemps. J'ai eu mon premier enfant à 25 ans. Je vais en avoir 38 et ça fait un moment qu'il ne voit pas son papa. Il a bien envie de le voir. Ca devenait long pour tout le monde sur la fin...
 

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