Dans ce nouveau carré para, nous partons à la découverte de Gianni et de son enseignante Sabrina. Inspiré par leur duo, le TC Sochaux souhaite développer son activité paratennis.
Tout commence par une terrible épreuve. À l'âge de deux mois, le petit Gianni contracte une coqueluche maligne sévère. Il passe huit semaines à l'hôpital, dont six en coma artificiel. De cette douloureuse maladie, Gianni garde des séquelles motrices et neurologiques affectant son apprentissage de la marche ainsi que l'utilisation du côté gauche de son corps.
Mais le petit garçon, qui a aujourd'hui six ans, est un battant. Pour lui permettre de s’épanouir, il va pouvoir compter sur l’investissement au quotidien de sa famille, mais aussi sur la bienveillance de Sabrina Euvrard Trible, du TC Sochaux.
"J'entraîne Gianni depuis la saison 2021/2022, explique-t-elle. Il est le petit frère d’Enzo, un joueur du club. Marjorie, sa maman, m'a fait part à l'époque de la difficulté qu'elle rencontrait à trouver des professionnels de santé pour prendre en charge son enfant régulièrement. Pour moi l'enjeu était double : Gianni devait accéder à ses rêves de tennisman mais aussi progresser au mieux dans sa rééducation. Tout ce qu'il réussira à acquérir sur un court pourra peut-être lui permettre de gagner en autonomie et pourquoi pas marcher ?".
Une formation pour mieux encadrer
Le petit garçon est en effet bien entouré. Sa maman l’emmène souvent dans les bois pour des promenades et multiplie les activités pour développer la motricité fine de son fils. Dernièrement, Gianni a reçu un vélo adapté à son handicap, ce qui lui permet de travailler sur ses jambes.
Sportif, le tennisman en herbe a toujours une balle ou une raquette à la main lorsqu'il est chez lui. D’ailleurs son papa Christophe joue au tennis. C'est donc tout naturellement qu'il a souhaité prendre des cours, comme son frère Enzo.
En quelques mois, Sabrina Euvrard Trible a mis en place des séances de tennis adaptées pour Gianni. Et très rapidement, ce dernier a souhaité jouer avec des rebonds. Seule possibilité : le faire jouer en tennis-fauteuil.
"Il me fallait absolument des connaissances concernant cette pratique, précise l’enseignante. J'ai participé à une formation Enseigner le paratennis, à Orléans fin octobre 2022. Cette formation est très complète et d'une grande qualité".
Beaucoup de joueuses / joueurs présents sur le terrain, des mises en situations très pertinentes, des données techniques précises, la découverte du tennis pour sourds et malentendants… Tout ceci conforte l'enseignante dans son envie d'accompagner au mieux Gianni et de développer le paratennis au club.
"Après avoir validé cette formation, le comité du club et moi-même avons sollicité le comité départemental de tennis du Doubs, et Pierre Vauthier, référent paratennis pour la ligue Bourgogne Franche-Comté. Ils nous ont tout de suite permis d'avoir le matériel nécessaire pour Gianni. Le club a financé en partie les cours individuels, car intégrer Gianni en cours collectifs était impossible. Depuis, il s’entraîne tous les mercredis matin. Nous essayons d'inventer des jeux qui lui permettent de progresser à son rythme, de travailler sa motricité du haut du corps".
Entraîner un enfant en situation de handicap requiert forcément quelques ajustements du côté logistique : le fauteuil doit être le plus adapté possible pour un très petit gabarit, la raquette doit être maniable et peu encombrante, et la prudence reste de mise. Les températures doivent permettre à Gianni de jouer sans prendre froid, car un petit rhume peut vite devenir un véritable problème.
Respecter le rythme et les besoins
Il y a aussi la nécessité que les entraînements se déroulent à trois : joueur / entraîneur / maman. En effet, Gianni n’arrive pas à toujours exprimer ses besoins et ses limites, et c'est donc naturellement que sa mère participe à toutes les séances, afin de le faire progresser en respectant son rythme.
Mis à part ces quelques ajustements, l'enseignement ne diffère pas d'un autre élève, affirme Sabrina Euvrard Trible. "Pour moi les séances doivent avant tout être ludiques, mais aussi accessibles et progressives comme pour mes autres élèves. Gianni est rieur, volontaire, et a toujours une blague ou une remarque à placer au bon moment ! C’est un vrai clown. Être sur le terrain avec lui est vraiment un plaisir ! L’entraîner et lui permettre d'atteindre ses rêves et d'exploiter son potentiel tennistique et extra tennistique est très stimulant".
© DR
"Gianni est rieur, volontaire, et a toujours une blague ou une remarque à placer au bon moment".
Inspiré par cette expérience, le club souhaite développer la section paratennis afin de permettre à toutes les personnes qui désirent jouer au tennis de pouvoir le faire dans une structure adaptée et labellisée. "Nous avons des projets comme une journée dédiée au club avec une démonstration de paratennis, des cours découverte gratuits pour les personnes en situation de handicap, et l’organisation d’un tournoi. Notre envie est d’impulser une société plus inclusive et solidaire".
Et au tennis, quel est le rêve de Gianni ? "Je n'ai pas eu de réponse très claire à cette question, sourit l'enseignante. Ce qui est sûr, c'est qu'il souhaite jouer avec 'Tata' - j’ai la chance d’être élevée au rang de Tata du tennis - et de battre son frère Enzo sur un court de tennis très prochainement !".(Emmanuel Bringuier)
Les mots de Marjorie, la maman de Gianni
Gianni a dû travailler très dur pour pouvoir récupérer ce que la maladie lui a pris, et il y a encore beaucoup de travail. Mais nous avons un petit garçon plein de vie, avec un caractère bien trempé.
Au début, nous avons joué avec des balles de tennis puis Gianni s'est pris de passion pour cette balle jaune. Il a mené un sacré combat pour pouvoir jouer, tenir une raquette et frapper dans la balle. Grâce à ce jeu et aux entraînements, il a gagné en coordination, en motricité, en concentration, et en mémoire.
Après de longues années de travail, Gianni a aujourd'hui la chance d'être accueilli dans le club du TC Sochaux, et à chaque séance, nous notons des progrès. Les séances lui font le plus grand bien pour sa rééducation et il adore y aller tous les mercredis.
Les mots de Sandrine Kauffmann, présidente du TC Sochaux
L’état d’esprit de l’équipe du tennis club de Sochaux est de permettre à tous de s’épanouir dans le sport, aussi bien les compétiteurs, les joueurs loisirs, que les personnes en situation de handicap ou ayant des pathologies diverses qui sont très souvent "oubliées" par le système actuel.
Nous sommes dans une société où tout doit suivre des normes, et malheureusement un grand nombre de personnes ne sont pas ou plus dans ces normes, car la vie les a mises à rude épreuve. La réalité est telle que pour elles, les portes se ferment sur les plans social, professionnel et personnel, et encore trop peu de structures sont adaptées à leurs particularités.
Le tennis club de Sochaux souhaite donc ouvrir ses portes à toutes ces personnes "hors normes" pour les aider à se reconstruire et leur permettre de s’épanouir à travers le sport. Nous souhaitons mener des actions pour récolter des fonds et aider la commune à financer notre projet de réhabilitation de nos locaux, pour les accueillir dans les meilleures conditions.
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