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Cinq conseils pour devenir un cador de l'indoor

Dans ce nouvel épisode de "Conseils aux compétiteurs", Laurent Raymond, l’ancien entraîneur d’Arthur Fils de de Corentin Moutet (notamment), nous donne quelques précieuses ficelles pour mieux performer en indoor.
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Depuis le ralentissement des surfaces constaté à l’aube du XXIè siècle, et ayant entraîné notamment l’interdiction des salles en parquet sur le circuit principal, on trouve moins de purs spécialistes de l’indoor chez les joueurs professionnels qu’à une certaine époque. Ou, disons, dans de moindres proportions.

Chez les amateurs en revanche, la spécificité du tennis en indoor subsiste pleinement. Qui n’a jamais fait des cauchemars (ou des rêves de service-volée) à la veille d’un match programmé dans un bon vieux gymnase omnisports ultra-rapide, ou dans une salle en résine sur laquelle l’usure du temps a agi comme une machine à poncer, rendant le rebond d’autant plus fusant et rapide ?

Certains ont un tennis plus naturellement adapté à ce type de conditions assez extrêmes, peut-être aussi parce qu’ils ont appris à jouer dessus. Pour d’autres, cela peut s’avérer plus compliqué, voire parfois virer au bourbier. Voilà pourquoi certaines surfaces indoor sont aussi les plus propices aux 'perfs' les plus spectaculaires dans les rangs amateurs. Raison (supplémentaire) pour laquelle il est indispensable d’en maîtriser toutes les clés.

Bien sûr, il y a aussi des salles plus lentes (voire en terre battue), qui vont convenir à un plus grand nombre. Mais dans le fond, les grands principes du tennis indoor restent les mêmes, à doser simplement selon le degré de rapidité du revêtement. L’entraîneur fédéral Laurent Raymond, dont la fructueuse collaboration avec Arthur Fils – qu’il a emmené dans l’élite mondiale – vient de se terminer, nous parle ici de ces fondamentaux. Consommez-les sans modération : ils sont reproductibles à tous les niveaux.

FFT / Cédric Lecoq
Comment adapter votre jeu à l'indoor ? Le très respecté entraîneur Laurent Raymond vous donne quelques clés.
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1/ Jouez de manière plus directe et plus tendue

C’est l’une des principales caractéristiques du jeu en salle : un tennis plus rapide, plus rectiligne, où l’on va jouer beaucoup moins avec les trajectoires par rapport à des surfaces lentes.

"En indoor, les trajectoires sont plus à plat, le jeu est plus direct et plus tendu, explique Laurent Raymond. D’une part parce que l’indoor prend moins le lift mais aussi parce que, comme la surface est plus rapide, on peut moins se permettre de décrocher pour arrondir les trajectoires, comme on peut le faire en extérieur."

Les coups plus à plat induisent un style de jeu plus agressif et davantage tourné vers l’avant. Et comme en face, cela arrive également plus vite, il faut s’adapter techniquement.

"Je ne conseille pas un changement de prise car c’est souvent trop compliqué. En revanche, il faut arriver à faire les choses plus simplement et plus directement, avec une phase d’orientation des épaules plus précoce et une amplitude de rotation quelque peu réduite. Le geste est plus direct, en quelque sorte."

A l'image de Benjamin Bonzi, privilégiez des frappes tendues dans ces conditions de jeu.
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2/ Sortez la machine à « chips » !

Si, comme on l’a dit, le lift prend beaucoup moins en indoor que sur les surfaces plus abrasives, le slice, en revanche, est l’effet roi de la salle ! Plus celle-ci est lisse (donc rapide), plus elle parvient à garder le rebond très bas. Donc plus le slice s’y avère gênant.

"En indoor, le slice est vraiment une arme redoutable, il ne faut pas hésiter à s’en servir beaucoup, en revers et même en coup droit, mais aussi bien sûr au service, poursuit celui qui avait aussi emmené Corentin Moutet jusqu’à son meilleur classement, l’année dernière. C’est d’autant plus vrai aujourd’hui, à une époque où l’on est plus sur la puissance et où les joueurs, je trouve, ont davantage de mal à relever la balle quand elle est sous le filet. Certes, garder un « chip » bien bas, c’est difficile techniquement : en général, ce sont les anciens qui le maîtrisent le mieux !"

Et pour ceux, jeunes ou moins jeunes, qui ont plus de mal à générer ce bon vieux slice, cela vaut vraiment la peine de le travailler. On ne connaît pas un joueur ou une joueuse qui juge cette arme inutile à son arsenal.

FFT / Nicolas Gouhier
Le slice, un art bien maîtrisé par Grigor Dimitrov.
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3/ Mettez l’accent (entre autres) sur le service et le retour

Quand on pense aux spécialistes de l’indoor des années 80 ou 90, on pense surtout à des gros serveurs du genre Boris Becker, Goran Ivanisevic, Pete Sampras ou autres Marat Safin, pour ne citer que des anciens vainqueurs du Rolex Paris Masters.

C’est une évidence, le service est une arme majeure du tennis indoor. Même si vous naviguez en milieu de Troisième Série - ce qui est déjà très respectable -, vous avez sans doute constaté que vous tenez davantage vos engagements en salle. Laurent Raymond préfère donc le rappeler : "Avant d’attaquer la saison indoor, il faut beaucoup travailler le service, la 1ère comme la 2ème balle, en privilégiant le slice. Il est intéressant de pratiquer davantage le service-volée, pour ceux qui ont des aptitudes à le faire."

Tenir son service est une chose, mettre en échec le service de l’adversaire en est une autre, tout aussi importante. Celui qui a aussi été l’entraîneur de Fabrice Santoro ou de Michaël Llodra conseille donc, en indoor, de mettre également l’accent sur le retour. Ainsi que sur le jeu au filet, forcément plus sollicité qu’ailleurs. En contrepartie, un coup comme l’amortie y est globalement moins efficace, ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut jamais l’utiliser.

Bref, le tennis en salle a ses spécificités. Et il convient donc de se préparer en fonction. "Par exemple, en préparation physique, on va insister davantage sur l’explosivité. Comme le jeu va plus vite, il y a aussi un intérêt à travailler l’œil, avec des exercices spécifiques", résume le technicien fédéral.

Mike Frey
Le service doit être soigné en indoor, à l'image de ce que produit Caroline Garcia.
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4/ Méfiez-vous des bonnes sensations

Vainqueur du Rolex Paris Masters en 1991, Guy Forget avait dit un jour : "Le vrai tennis se joue en indoor." Sous-entendu : la meilleure qualité possible de tennis. Le tennis ultime, en quelque sorte.
Il est vrai que le tennis indoor, au-delà de ses conditions souvent plus rapides, a une autre grande spécificité, que relève Laurent Raymond : "Il y a une stabilité parfaite des conditions. Tous les jours, c’est la même surface mais aussi la même température, le même taux d’humidité. Il n’y a pas de soleil, pas de vent et les repères visuels sont en général meilleurs. De ce fait, tout le monde a de meilleures sensations en indoor et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle il y a un temps d’adaptation moins important."

Mais ces sensations améliorées peuvent être également un faux-ami. Ne les laissez pas vous précipiter dans un excès de confiance qui mènerait tout droit à votre perte. D’une manière générale, ces fameuses sensations sont souvent trompeuses au tennis : pour gagner un match de tennis, mieux vaut s’accrocher à une bonne attitude et à ses valeurs intrinsèques plutôt qu’à un ressenti purement subjectif. Ceci est d’autant plus vrai en indoor où, en outre, l’adversaire (normalement) est lui aussi censé mieux sentir la balle.

Comme le fait remarquer le prédécesseur de Sébastien Grosjean au chevet d’Arthur Fils, "c’est pour cela qu’on dit toujours qu’il ne faut jamais tester des raquettes en indoor. Car on peut avoir d’excellentes sensations en salle et, au final, ne plus rien sentir en passant dehors."

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5/ Envisagez de baisser la tension de cordage

Un peu en corollaire de tout ce que l’on vient de dire, de nombreux joueurs professionnels font le choix de baisser leur tension de cordage au moment de passer à l’indoor. Ce choix, pas forcément connu, est pourtant logique. Un cordage plus tendu, on le sait, permet un meilleur contrôle de balle (au détriment de la puissance). Or, la stabilité des conditions en indoor implique déjà naturellement un meilleur contrôle. "Il peut donc être intéressant de baisser sa tension pour privilégier la vitesse, notamment au service", synthétise Laurent Raymond.

Un cordage un peu plus détendu va également favoriser ce tennis direct, rapide et plus à plat dont on a parlé. Votre jeu au filet devrait, lui aussi, gagner en efficacité, avec des volées plus tranchantes et un meilleur toucher.

Certes, il est plus difficile pour un joueur amateur, par rapport à un professionnel, de faire varier sa tension de cordage quotidiennement. Mais essayez : un bon kilo en moins (voire davantage) pourrait peut-être vous réconcilier pour de bon avec ce tennis en indoor qui vous a causé tant de migraines jusque-là.

(Rémi Bourrières)
 

FFT / Philippe Montigny
A l'image d'Adrian Mannarino, spécialiste des cordages à la tension basse, ajustez votre cordage pour gagner en contrôle.
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